6 Mai 2016
Le 28 avril 2014, j'ai eu l'infime honneur d'accueillir Cédric Villani dans le cadre de conférences que sponsorisait l'Association Victor Hugo dont l'entreprise que je dirige est membre. Il fallait dire quelques mots pour accueillir cet orateur prestigieux. Qui s'y colla ? :-o)
Monsieur l’Ambassadeur, Monsieur le Professeur, Mesdames, Messieurs, chers amis,
Difficile de prendre la parole entre deux orateurs prestigieux. En mathématiques, ce moment particulier doit probablement s’appeler un intervalle !
Cher auditoire, je vous rassure tout de suite, je ne suis pas là pour tenir le micro, mais le Président de l’Association Victor Hugo a demandé à l’un des deux assureurs sponsors de cette conférence de bien vouloir présenter notre orateur du jour. Je m’exécute de très bonne grâce et, je peux le dire, avec une certaine gourmandise !
Cela fait presque 50 ans que j’attends de m’offrir un professeur de maths et voilà que le rêve devient réalité.
Cher Monsieur Villani, vous êtes né en 1973 l’année de mon baccalauréat – section D, parce que j’étais trop nul en maths pour faire C. Et comme je connais le jour exact, et sans le secours du moindre actuaire, je peux conclure que vous êtes encore dans votre quarante et unième année.
Vos parents sont enseignants en lettres, ce qui démontre que les littéraires font des matheux. Je me demande par contre si l’inverse fonctionne : autrement dit, les matheux font-ils des littéraires ? A moins qu’il ne faille parler de réciproque, plutôt que d’inverse ?
Vous avez effectué votre scolarité à Brive, puis Toulon, ce qui fait nécessairement de vous un spécialiste du rugby (donc disposant d’un cerveau développé pour en comprendre les règles - CQFD), et comme tout fils brillant d’enseignants, vous passez par Louis le Grand en prépa avant d’intégrer l’Ecole Normale Supérieure de Paris. Je le dis ici pour nos amis non français moins au fait des méandres et arcanes des études supérieures en France, il s’agit de l’Ecole qui fournit les professeurs à Polytechnique, en quelque sorte, les F de X (f, comme formateur) !
Il paraît que l’on vous surnommait Marsu. Par souci de brièveté et de discrétion dans mon propos, je n’ai pas creusé les raisons de ce surnom. Peut-être aborderez-vous la question pendant votre intervention…
Je vais vite en quelques chiffres ou dates :
1996 : agrégé préparateur à Normale Sup
1998 : votre thèse – contribution à l’étude mathématique des gaz et des plasmas
1999 : professeur invité à Georgia Tech
2000 à 2010 : professeur des universités à l’Ecole Normale Supérieure de Lyon
2001 : prix Louis Armand de l’Académie des Sciences
2003 : prix Peccot-Vimont
2004 : professeur invité au Miller Institute (Berkerley)
2007 : prix Jacques Herbrand
2008 : prix de l’European Mathematical Society
2009 : professeur invité à l’Institute for Advances Studies (Princeton)
2009 : directeur de l’Institut Poincaré et prix Henri Poincaré
2009 : prix Fermat
Depuis 2010 : professeur des universités à l’Université Claude Bernard (Lyon 1)
2013 : professeur invité au Mathematical Sciences Research Institute (Berkeley)
Je m’arrête là sur le parcours, sinon, ce n’est pas vous que l’on sera venu entendre.
Ce qui a fait de vous un personnage plus grand public, c’est cette médaille Fields que vous recevez lors de la cérémonie d’ouverture du congrès international des mathématiciens de 2010 à Hyderabad en Inde. Méchant Alfred Nobel qui préférait la littérature et la poudre mais ne savait pas compter, et a donc oublié d’honorer les mathématiques d’un prix prestigieux !
Soyons donc un peu franco-franchouillard : la médaille Fields, surtout quand on la donne à un français, c’est encore mieux qu’un prix Nobel ! Et toc !
Mon rôle était de vous chauffer la salle (si tant est qu’elle en avait besoin).
Permettez-moi donc de terminer en apothéose, en résumant vos travaux, ce qui est somme toute assez simple.
Théorie des équations aux dérivées partielles de la physique statistique, en particulier sur l'équation de Boltzmann avec démonstration consécutive sur la production d'entropie dans la dite équation. Vous avez ensuite établi des estimations de convergence vers l'équilibre toujours pour la même équation, mais dans un contexte non perturbatif, et sous l'hypothèse de régularité uniforme. Puis, vous avez tout de même établi que l'amortissement Landau s'applique dans un contexte perturbatif non linéaire.
Vous avez également travaillé sur la théorie du transport optimal (qui n’a absolument rien à voir avec le futur tramway de Luxembourg).
Enfin, vos autres travaux incluent aussi des applications à la géométrie différentielle, liant la courbure de Ricci, le transport optimal et l'entropie.
J’en repère dans la salle qui commencent à avoir un peu peur…
Mesdames et Messieurs, l’éléphant a attrapé un gros rhume (en avril ne te découvre pas d’un fil). Il éternue et se mouche sans arrêt. Il doit changer son mouchoir toutes les demi-heures.
Le vétérinaire consulté indique que son rhume va durer huit jours ! Calculez en hectares, ares et centiares la surface des kleenex que l’éléphant va utiliser, sachant qu’un mouchoir d’éléphant est un carré de 6 mètres de côté ![1]
Cher public, vous avez une heure ! Mais je vous laisse entre les mains du meilleur professeur possible !
[1] Nombre de demi-heures en 8 jours : 24 x 8 x 2 = 384 demi-heures
Surface d’un mouchoir : 6 x 6 = 36m²
Surface totale des mouchoirs : 36 x 384 = 13 824 m²
Soit 1 hectare, 38 ares et 24 centiares